Accepter d’être accueilli pour accueillir
J’aime beaucoup l’ambiguïté du mot hôte en français.
Sans contexte, il est absolument impossible de déterminer si notre interlocuteur est la personne qui accueille ou la personne qui est accueillie… Notez que cela fonctionne aussi avec le féminin hôtesse, ce qui est une bénédiction – l’accueil ne fait pas de distinction sexiste ! Hôte qui reçoit ou hôte qui est reçu : il y a finalement une interchangeabilité dans le sens comme si l’une et l’autre de ces positions n’étaient au fond qu’une seule et même disposition d’être.
La plus jeune de mes filles hésite et trébuche encore avec les auxiliaires être et avoir lorsqu’elle doit utiliser le passé composé et il arrive qu’elle dise un « je m’ai trompé » ou un « je m’ai fait mal »… Au fond, qu’elle se trompe ou qu’elle se fasse mal, la confusion vient surtout de la difficulté à saisir si dans ce qui lui arrive (de l’ordre de l’erreur ou de la chute) elle est sujet ou objet de ce qui se passe… Et en effet, comment comprendre cette subtilité de la langue française qui transforme l’erreur en un verbe réfléchi : se tromper. Comme si volontairement je – en tant que sujet – choisissait de tromper moi – en tant qu’objet ? Adèle soutient au fond une forme de logique : l’erreur ne peut m’advenir que de l’extérieur : « je m’ai trompé » n’est-il finalement pas parallèle à « on m’a trompé » ?
Il y a finalement ce même jeu entre le sujet et l’objet de l’accueil, dans le mot hôte. Celui qui accueille comme celui qui est accueilli ; celui qui est accueilli comme celui qui accueille. Ne doit-on pas finalement être dans une forme de disponibilité à l’autre pour pouvoir l’accueillir ? Autrement se mettre soit même en position d’être accueilli, de se déposséder de quelque chose, pour qu’un espace existe entre nous et que la rencontre devienne possible ? Et finalement, par qui d’autre que par Dieu sommes-nous accueillis ?