Balade matinale contemplative
Mère de trois enfants, engagée dans l’enseignement et la transmission mémorielle, Sophie Alfieri a récemment découvert la foi chrétienne et demandé le baptême. Elle partage ici une promenade qui lui est chère…
Tous les matins, quel que soit le temps, je pars dès que le jour commence à poindre pour une petite marche dans le sous-bois qui se trouve en contrebas du jardin public de Palette, au Tholonet.
Mes pas me portent invariablement le long d’un itinéraire inscrit dans un étroit chemin creusé entre le cours d’eau de la Cause – vigoureux à certains endroits de rétrécissement – et les grands arbres silencieux, mais si expressifs par leurs formes, leurs torsions, leurs abandons jusqu’à la rupture parfois…
Chacun de la même espèce, chacun unique. Entourés et parcourus par les végétations de saisons, je les connais tous et pourrais presque les nommer, un par un, sur mon passage. Ce sont les compagnons bienveillants et silencieux de mes promenades matinales. Ils semblent adhérer à mes pensées et participer à mes prières.
Et puis, il faut du vent pour faire parler les arbres… Depuis le mouvement saccadé de la canopée surgit la chorégraphie des hautes branches feuillues. Non content de parler, l’arbre danse. Et moi je le contemple, fascinée par la féerie de sa soudaine transformation. Qui a dit que l’arbre ne pouvait pas bouger ? Certes, s’il est planté au sol par de profondes et puissantes racines, qui font qu’en toutes circonstances il garde « les pieds sur terre », rien ne l’empêche – encouragé par son complice le vent – d’agiter ses branches comme autant de bras frêles et verdoyants d’une sylvestre danseuse. De ces mouvements désordonnés, mais gracieux, de ce murmure des branches entre elles naît une complainte, celle de l’arbre qui s’exprime, caressé par le Souffle divin.
Je baisse les yeux pour quitter les sommets animés des arbres et mon regard rencontre les tendres fleurs bleues des matins du renouveau. Elles se mêlent volontiers aux modestes, mais flamboyantes corolles des boutons d’or, pour communier dans une parfaite harmonie de couleurs et de formes.
Je presse le pas dans le sentier qui exhale les premières odeurs du matin. Bois légèrement humide, terre remuée par les sabots ravageurs des sangliers, fragrance discrète de la rivière qui court, toujours pressée, dans son lit d’éternité. Au plus profond du chemin, je suis éblouie par un rayon qui transcende l’espace, par une goutte d’eau ou de rosée, qui relève le vert touchant des plantes amies, par un mouvement de branches qui fait craquer les arbres qui s’entrechoquent… Partout, dans cette nature parfaite et harmonieuse, je reconnais chaque matin avec émotion et dévotion l’œuvre de Dieu. Je ressens alors encore plus fortement qu’il nous appartient d’honorer et de protéger cette nature qui nous a été offerte afin que la joie demeure en nous.
Je reviens de la balade dans cet écrin de verdure et d’arborescence portée par la Grâce de la prière, remplie de la Paix de l’En-Seigneur, prête à une nouvelle journée à la gloire de Dieu.