Mise en route (22)

Envoyé vers les autres

01 octobre 2017

Cette réflexion est développée dans le n°73 de la revue « Perspectives Missionnaires ». Dans son dossier «Témoignage et diaconie» notre auteur y écrit sous le titre «Perspectives diaconales du culte dans une Église issue de la Réforme».

Jeune bachelier et néo-protestant ayant décidé de faire des études de théologie, j’affectionnais particulièrement le texte biblique de Jean 13 montrant Jésus lavant les pieds de ses disciples. Dans des camps de jeunesse, où j’avais découvert ma vocation pastorale, j'aimais le citer, jusqu’au jour où mon pasteur me demanda de conduire la méditation du matin. Évidemment je choisis mon « texte fétiche ». Et lors du premier culte que je célébrais à la Faculté de théologie, l’auditoire eut droit au lavement des pieds.

 

Un copain me charriait en me disant que je lui cassais les pieds ! Pourquoi ce texte me fascinait-il autant ? Je me suis posé la question après avoir enfin varié mon répertoire de textes bibliques prêchés. C’est l’objection de Pierre au geste du lavement des pieds de Jésus, qu’il me plaisait de commenter. Pierre y mettait comme condition que Jésus lui lave aussi la tête et les mains. Alors que Jésus voulait accomplir un geste profane de service, Pierre voulait bénéficier d’un geste religieux, sacré, le lavement des mains et de la tête, pour être béni et purifié. Jésus s’y opposa et expliqua le sens de son ministère au service des autres.

© Schutterstock

Se laver les pieds les uns des autres, et le faire comme un exemple à sa suite, m'a mis en route dans mon ministère et mes engagements ecclésiaux. Je serai un « chrétien social » ! Quelques maîtres découverts à la faculté de théologie – Tommy Fallot avec sa notion de « droit au salut » et Dietrich Bonhoeffer avec celle de « christianisme profane » – m’ont aidé à emprunter ce chemin. J’en ai connu les forces et les joies, mais aussi les faiblesses et les risques. Parmi les forces, j’ai découvert et approfondi le réalisme de la Bible. Elle parle toujours de situations concrètes, mettant l’homme aux prises avec son destin : être sujet de la grâce et de la libération. Parmi les faiblesses, j’ai cru que l’engagement politique, conséquence logique du christianisme social, préparait le royaume de Dieu sur terre. Puis j'ai renoncé à cette sorte de sacralisation du politique : Jésus l'aurait probablement refusée, autant que le lavement des mains et de la tête de Pierre.

 

Nous étions dans les années 1960-70, période optimiste mais sujette à la désillusion. Pourtant, je demeure convaincu de la dimension diaconale de l’Évangile. Dans le texte de Jean 13, Jésus mêle ses réflexions à un repas partagé avec ses disciples comme préfiguration de la cène. Ce fait m’a prouvé que la cène constitue l’élément fondamental d’une partie diaconale du culte avec l’offrande, le partage des nouvelles et l’intercession. Les autres, ceux du dedans et du dehors de l’Église, sont fortement présents à ce moment-là du culte. Enfin, Jésus a associé à ce récit un passage sur le choix de vie que doivent faire les disciples en le suivant. Ce fait m’a définitivement convaincu que je ne pouvais pas reculer.

 

 

Jean-François ZORN
pasteur retraité, Aulas (30)

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