Pour l’indépendance

Matheo, étudiant

28 août 2018

Sans violence, mais avec détermination, la jeunesse de Nouvelle-Calédonie, à l’exemple de Matheo, croit en un nouvel avenir pour son pays, plus responsable et plus respectueux à la fois des populations et de l’environnement.

 

Matheo Kaemo est métis, né d’une mère métropolitaine et d’un père kanak, originaire de l’île de Lifou. Enfant et adolescent, il a vécu sur les deux territoires, mais c’est en Calédonien qu’il a débarqué en septembre 2017 à Aix-en-Provence pour intégrer les Arts et Métiers.

C’est un jeune homme à la fois sérieux, calme et prolixe. Son éducation familiale allie coutume kanak et protestantisme et il en tire quelque chose de structurant. Son retour sur le sol européen n’est pas sans déceptions. « Ici, je me sens… pas vraiment étranger, mais on n’a pas la même façon de vivre ! Quand certains étudiants ont besoin d’aide, pour les cours ou pour le quotidien, il y a peu de solidarité. Je ne sais pas si c’est Aix, ou si c’est pareil ailleurs… »

Son seul désir : inventer une nouvelle Nouvelle-Calédonie

(© Séverine Daudé)

 

Des projets pour l’avenir

Né à Grenoble, Matheo est parti jusqu’à l’âge de 2-3 ans en Nouvelle-Calédonie, puis il a vécu près de Lyon entre 3 et 15 ans. La terre de Kanaky, il la revoyait de temps en temps, pendant les vacances. Son ambiance collective l’attirait déjà et l’a fait y revenir. C’est là-bas qu’il a suivi le lycée. Passionné par ces îles, par leur richesse naturelle, il cultive des projets professionnels tournés vers les énergies renouvelables. Il souffre de voir les mines de nickel dévorer les montagnes, les usines déverser des tonnes d’acide et rejeter des fumées toxiques. « L’extraction du nickel représente une bonne partie de notre PIB ! Il faut donc trouver d’autres moyens de vivre. »

 

Susciter un réveil

Pourquoi l’indépendance ? Matheo répond que cela améliorerait à coup sûr les conditions de vie des Calédoniens. « Elles sont correctes pour un certain nombre d’entre nous, mais les évolutions qui ont eu lieu, c’est grâce à ce que les jeunes ont fait dans les années 80. Sans ces événements, rien n’aurait bougé. » Redistribution des richesses, politique de la ville, approvisionnement des zones les plus reculées en eau potable et électricité… par quelle magie l’indépendance apporterait-elle tout cela dans sa hotte ? « Ce changement politique et cette nouvelle responsabilité créeraient une prise de conscience, un réveil, affirme Matheo. Cela motiverait les gens à s’investir dans quelque chose de commun. Ce n’est pas le cas actuellement. »

Dans sa résidence étudiante aixoise, Matheo ne sent pas beaucoup de soutien à ses rêves. Ignorance ou indifférence des habitants de l’Hexagone ? En tout cas, c’est certain, si l’indépendance était à l’agenda, il repartirait, dès son diplôme en poche, pour faire vivre cette nouvelle Nouvelle-Calédonie.

 

 

Séverine DAUDÉ,
journal Échanges

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