Accueillir, soigner et conduire à l’autonomie sociale
Voilà un endroit qui porte bien son nom. Au fond d’un vallon dans un beau paysage de forêts et de vignes se cache un monument empreint d’une forte spiritualité. D’abord monastère de chartreux, ermites communautaires, puis hôpital, soignant des lépreux, la chartreuse de Valbonne a toujours su être à la fois un espace d’accueil et de protection. Aujourd’hui encore, sa vocation n’a pas changé. Le lieu est ouvert aux visiteurs et protège toujours des personnes en difficulté.
Quelques chiffres pour commencer. Depuis 1926, c’est l’association de secours aux victimes de maladie tropicale (ASVMT) qui mène toujours sa mission. 270 personnes accueillies, 200 employés, un établissement et service d'aide par le travail (ESAT), un foyer d’hébergement, un foyer de vie. La chartreuse de Valbonne est une institution sociale qui joue un rôle primordial dans le département du Gard.
En 2001, l’agence régionale de l'hospitalisation (ARH) a retiré les agréments pour le bâtiment d’origine dans les anciennes cellules des chartreux. Elle voulait que les pensionnaires soient plus proches des médecins, dans un centre-ville. L’ASVMT décide d’installer 10 lits à Nîmes sous forme d’appartements thérapeutiques et 30 lits à Bagnols-sur-Cèze au château de Coulorgues. Le 16 juin 2003, le dernier lépreux quitte la chartreuse de Valbonne, une page historique se tourne.
Une léproserie française
À l’origine de cette aventure, le pasteur Philadelphe Delord, pasteur missionnaire qui découvre les ravages de la lèpre et décide de soulager les malades. Investi auprès des lépreux en Nouvelle-Calédonie, il se rend en France pour une collecte de fonds. Il est alors interpellé par des lépreux en France. Étonnant, non ? Des militaires et quelques colons ont contracté la maladie. De retour en France, rien n’est fait pour eux. Ému par la situation, le pasteur Delord décide de créer une léproserie et ce sera, grâce à l’aide d’un mécène américain, l’achat aux enchères de la chartreuse de Valbonne.
Au terme d’un petit combat avec les autorités et d’importants travaux d’aménagements, le premier lépreux arrive en 1929. Cette activité perdure jusque dans les années 70 et la découverte d’un vaccin qui prévient et guérit la lèpre. À cette date l’ASVMT se retrouve sans raison d’être. À la fois une victoire, puisque la lèpre était vaincue, mais une situation étonnante. Reste un engagement moral de tous les présidents successifs : protéger et garder tous les pensionnaires lépreux jusqu’au dernier.
L’association décide de s’investir dans l’aide aux personnes atteintes d'un handicap mental. La direction des affaires sanitaires et sociales (DASS) est à la recherche d'un lieu pouvant accueillir des personnes en postcure psychiatrique.
L’accueil, une tradition
Mais il faut évoluer. Pour qu’un tel lieu vive, il lui faut des projets. C’est la création en 1992 d’un établissement et service d’aide par le travail (ESAT). Mais quel travail ? Autour de la chartreuse de Valbonne, il y a des terres agricoles. Le conseil d’administration décide de replanter des vignes. Déjà, sur ces mêmes terres, les chartreux faisaient fructifier des grappes de raisin. Ce sont aujourd’hui 16 hectares (bientôt 18) qui produisent le délicieux vin de Valbonne. Il faut venir découvrir le lieu au moment des vendanges et déguster au cellier le vin produit sur place.
Mais il ne faut pas oublier que la chartreuse de Valbonne, malgré son nom, est un lieu protestant. Tous les cinquièmes dimanches du mois, un culte est célébré dans l’ancienne et splendide chapelle. Régulièrement, les protestants du consistoire Gardon - Rhône se retrouvent dans l’immense cloître pour des moments de fête.
Aller toujours de l’avant
Depuis 2010, les investissements continuent. La création du foyer Marie Durand à Laudun permet d’accueillir 38 adultes handicapés. Pour offrir de nouveaux services, l’ASVMT a décidé de s’engager auprès des personnes âgées. Le foyer gère 35 personnes hébergées dans des familles. Pour aller encore plus loin, le projet prévoit la construction de trois maisons en partage. Des logements de plain-pied, des structures pour des personnes à faible revenu. Ces structures sont faites pour des personnes âgées qui ont perdu leur autonomie mais trop jeunes pour être prises en charge dans un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD).
Christian Gilles, président de l’ASVMT, souligne que les associations à but non lucratif pallient les manques des départements et s’occupent des personnes entre la retraite et l’entrée en EHPAD.
Au-delà des murs
Si la chartreuse de Valbonne est protégée par ses hauts murs, ses grands portails et ses tours, elle reste un lieu d’ouverture et d’accueil. Lorsqu’on réalise le nombre de bâtiments en gestion, la multiplicité des actions et le nombre de personnes aidées et soutenues, on ne peut qu’être impressionné par le travail de cette œuvre protestante qui a eu et connaît encore des heures de gloire. Comme toute institution à but social, l’ASVMT a besoin d’aide et de soutien.
Vous pouvez déjà vous rendre dans ce lieu pour découvrir les splendeurs de l’architecture, le plus grand cloître d’Europe, le patrimoine des chartreux, vous pouvez aussi venir découvrir les paysages et les chemins qui vous emmènent dans les bois environnants, vous pouvez surtout comprendre l’engagement de ces femmes et de ces hommes au service des autres. Parce que là est l’essentiel. Même si le dernier lépreux a quitté définitivement les lieux en 2003, le dévouement des membres de l’ASVMT a su évoluer et trouver son épanouissement dans l’aide aux personnes fragilisées par la vie.