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Rencontre avec

Myriam Préaux, tricoter l’Évangile au fil de sa vie

10 novembre 2021

« Le fil rouge de ma vie professionnelle, c’est l’accompagnement » de la fragilité humaine, confie Myriam Préaux. Insatiable chercheuse de sens, cette infirmière de profession est depuis quatre ans aumônière des maisons de retraite protestantes lyonnaises.

Vendredi 15 h à l’Ehpad Déthel. Une quinzaine de résidentes attend patiemment le début du culte. Myriam virevolte de l’une à l’autre et accueille avec le sourire. Une liturgie en textes poétiques. Quelques strophes de cantiques bien connus. Une courte prédication, en lien avec le quotidien des résidentes. Appuyée sur le texte biblique du dimanche à venir pour marquer la communion avec l’Église du Christ. Myriam a préparé la Cène qu’elle apporte à chacune. Une sérénité bienvenue s’instaure, alors que la maison bruisse tout autour.

Découvrir une autre approche de la Bible

À la cinquantaine, Myriam Préaux est devenue aumônière en Ehpad après une carrière d’infirmière. Son histoire, témoigne-t-elle, passe par des rencontres, le questionnement du texte biblique, la volonté d’une grande ouverture sur les questions de la vie et un travail assidu de réflexion théologique. « Laisse ta foi questionner ta vie et ta vie questionner ta foi », a-t-elle exprimé à sa fille Marie-Lou à l’occasion de sa confirmation.

 

Née à Chalon-sur-Saône, petite dernière d’une famille de huit enfants, Myriam a été élevée dans un milieu darbyste. « La graine a été plantée, enfant », dit-elle. Mais, à l’adolescence, les questions fusent : pourquoi tant d’interdits et cette fermeture sur soi ? On ne peut vivre autour du seul culte ! À 20 ans, Myriam vient à Lyon pour des études d’infirmière. Elle est logée chez des protestants évangéliques (devenus ses « parents adoptifs »). Elle échange en permanence avec eux pendant plus de deux ans et découvre une autre lecture de la Bible. Son premier job l’amène à l’Hôpital Lyon Sud en cancérologie et neurologie. Là, d’autres portes vont lui être ouvertes, sur l’étude biblique, la prière, le silence, par l’aumônerie catholique de la santé : un lieu important quand on sait que les malades entrent dans ces services pour mourir. Son deuxième poste sera à l’hôpital Henri Gabriel auprès de handicapés à vie.

 

Entendre différemment les mots de la foi

À 23 ans, Myriam décide de quitter le darbysme pour tout d’abord fréquenter une communauté évangélique plutôt fondamentaliste. Elle découvre ultérieurement la paroisse protestante unie de Lyon-Oullins. À l’écoute de son pasteur, Guillaume de Clermont, elle entend différemment les mots de la foi : grâce, amour, pardon, et se les approprie. Myriam apprécie un accueil lui laissant le temps de « dénouer les fils… pour tricoter l’Évangile et sa vie ». Elle se marie en 2001 avec Didier, lui aussi soignant, d’origine catholique, au temple d’Oullins ; leurs enfants, Marie-Lou et Grégoire y seront présentés. Myriam finit sa carrière hospitalière dans un service de soins palliatifs. Elle y goûte la qualité d’écoute et la richesse d’un vrai travail d’équipe dans l’accompagnement ensemble, soignants et aumôniers.

Poursuivre le compagnonnage avec la Bible

Après vingt ans de pratique, Myriam choisit de faire de ce fil rouge de l’accompagnement humain son activité principale. Elle opte alors pour du travail ponctuel en Ehpad, crèches ou auprès de personnes handicapées. Jusqu’à ce qu’en janvier 2017, l’EPU de Lyon annonce le recrutement d’un aumônier laïc à mi-temps (aujourd’hui à 80 %) pour les Ehpad lyonnais. Myriam postule avec enthousiasme. Elle est choisie. L’expérience de soignante de Myriam et sa connaissance du milieu médico-social sont un atout dans ses relations avec les professionnels.

 

Myriam va poursuivre son « compagnonnage avec la Bible ». Elle suit une formation à la prédication, ainsi qu’un atelier conte pendant un an. « Les contes ouvrent des espaces de paroles avec les personnes qui ont des troubles cognitifs. Ils sont importants dans ma façon de faire des cultes, et ces histoires me nourrissent. » Elle obtient en juin 2021 son Diplôme universitaire d’aumônier à la faculté de Strasbourg. Comment faire passer le message biblique en Ehpad, auprès de personnes à la grande sensibilité, mais aux niveaux cognitifs très différents, jusqu’à 25 personnes parfois ? « Par la qualité de la présence, en accrochant les personnes par le regard » dit-elle. « Et il faut tout donner ! On obtient alors parfois des instants de grâce. »

Toujours accompagner le mieux possible

Il a fallu traverser les confinements dus au Covid. Avec l’isolement, les craintes, l’annonce de décès aux autres résidents ou les obsèques qui n’ont pu être célébrées… Myriam a accompagné, à distance, le mieux possible. Un Ehpad a souhaité son activité en présentiel. Dilemme pour Myriam, alors qu’elle imposait un strict confinement à ses enfants. Mais ils ont compris et accepté son choix risqué. Aujourd’hui, la famille vit à Décines, engagée dans la paroisse de l’Est lyonnais. Myriam est invitée permanente au conseil de paroisse. « En tant qu’aumônier, j’ai besoin de l’Église, et c’est elle qui m’envoie. ». Elle assure le lien entre Ehpad et paroisses. Le dimanche des Rameaux, des messages de bénédiction ont été écrits par les paroissiens et remis aux résidents des Ehpad.

« Parfois, j’ai l’impression d’avoir enfilé un habit trop grand pour moi. Mais tant mieux, le vent peut alors s’y engouffrer et me porter ; c’est ma prière ! », sourit Myriam.

En savoir plus

Des dates
Naissance en février 1968.
Mariage en 2001 avec Didier.
Naissances de Marie Lou en 2003 et Grégoire en 2007
Aumônière des trois Ehpad lyonnais : Déthel, Morlot et Les Landiers depuis septembre 2017

Des livres
qui l’ont marquée dans une perspective d’écoute globale de la personne : Mary Balmary (Le sacrifice interdit), Françoise Dolto (L’Évangile au risque de la psychanalyse) ou Michel Tournier pour son approche spirituelle de la médecine.

Un message fort de l’Évangile
Dans Jean 13, l’invitation de Jésus au lavement des pieds (à prendre soin) des uns par les autres pour nous remettre debout et reprendre le chemin ! « Une façon d’envisager notre humanité et notre interdépendance jusque dans le corps (position, pieds, soin…). »

Martine Fleur
journal Réveil

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