Francis Cabrel
Cet auteur-compositeur français des plus appréciés n’a produit que 14 albums en presque 40 ans de carrière. In Extremis est sorti l’an dernier. Dans des albums précédents, Francis Cabrel questionnait Dieu ou interpellait les religions. Dans In extremis, il confesse sa foi au Christ.
Les chansons d’amour de Francis Cabrel sont nombreuses et connues : Je l’aime à mourir, L’encre de tes yeux... Mais il a écrit aussi de nombreuses chansons engagées. La Corrida, véritable manifeste contre la tauromachie. African Tour dénonce avec vigueur les politiques migratoires européennes... Il faut dire que le chanteur est un élu politique aux convictions solides.
Plusieurs de ses chansons égratignent la religion chrétienne. Dans Les cardinaux en costume, il s’en prend aux prêtres et aux évêques peu engagés dans les problèmes du monde : prostitution, exil, misère… Dans Monnaie Blues, il critique des clercs aux mœurs plus que douteux. En 1994, dans Assis sur le rebord du monde, il se met à la place de Dieu pour le faire parler. Dieu apparaît sous la plume de l’artiste comme le créateur, navré de ce que les hommes ont fait de la création qui leur avait été confiée.
Il critique Dieu
Dans l’album Des roses et des orties (2008), la réflexion s’approfondit, la critique, toujours féroce, est plus mûre. Il consacre trois chansons à la foi ou à la religion : Les cardinaux en costume, Des roses et des orties et Un chêne-liège, où il prie Dieu, l’interpelle à la manière des psalmistes : « Est-ce que tu penses à nous un peu ? Est-ce vos larmes quand il pleut ? » Il conclut : « C’est le doute et le mystère que vous m’aurez appris le mieux. Adossé à un chêne-liège, je descendais quelques arpèges par un après-midi pluvieux. » Manière subtile de prolonger son interrogation sur l’origine de la pluie…
Mais pas question pour lui de croire à une vie éternelle dans un autre monde. C’est clair dans Des roses et des orties : « Les mêmes questions qu’on se pose/ On part vers où et vers qui ? / Et comme indice pas grand-chose/ Des roses et des orties. » La vie se vit ici-bas ! Les bonnes ou mauvaises choses que l’homme invente ou crée (très optimiste, Cabrel pense qu’il y aura plus de roses que d’orties) ne serviront à rien pour prolonger sa vie.
Mais il croit en l’amour
De tradition catholique, il se reconnaît profondément croyant. Et immanquablement non pratiquant. Dans une interview au JDD, il avoue que c’est sans doute son « côté protestant » qui refuse le faste, le décorum. Sa foi apparaît dans son dernier album, In extremis. Dans Dans chaque cœur, l’artiste écrit une chanson sur Jésus sans prononcer son nom. Mais, tout y est : la colline, la croix dressée, la couronne d’épines, les clous qui traversent les mains, un homme qui s’approche pour le faire boire… Le message est simple : dans chaque cœur, il y a un trésor, celui de l’amour du prochain. Cet amour que Jésus a montré par son message, ses actes et le don de sa vie sur la croix. Cet amour, incarné par l’homme qui s’approche pour faire boire le Christ, seul espoir « auquel il faut s’accrocher ». Au fond, une foi très humaniste et fort peu chrétienne…
Francis Cabrel est intéressé par le message du Christ, « le message seulement » ! Dans l’interview au JDD, il dit : « Le message premier de la religion que je connais le mieux – la religion catholique – est basé sur l’humanité, l’amour, le respect de l’autre. Dans l’époque brutale que l’on vit, il est important de se resserrer autour de choses très simples » comme celles-ci. « Un refuge simple, mais peut-être l’une des solutions ». Au fond, une foi très humaniste et fort peu chrétienne…